Nous vivons un nombre incalculable de vies. De nombreuses
personnes croient en la réincarnation, cette idée qu’un fil nous relie sans
cesse à ce monde quelle que soit la forme que nous prenons. S’il s’agit d’une
magnifique façon d’envisager les concepts de début et de fin, que par ailleurs
je partage, ce billet ne traite cependant pas de l’après. Du moins, pas de l’après
physique.
Un corps, un cœur, un cerveau, et des milliers de personnes,
voilà ce que chacun d’entre nous est. Nous sommes tantôt l’amant, tantôt l’amour.
Un jour nous sommes aimés, le lendemain, ça n’est plus le cas. Nous sommes
étudiants de la vie, de l’amour, de la passion, comme nous sommes professionnels
du mensonge, du secret et de la liberté. Prenons le mensonge : les plus
expérimentés parviennent à mentir à leur propre personne, d’autres à leur
moitié ou à leur entourage. Pourquoi mentir, me demanderez-vous ? Parce
que c’est facile. Et que la nature humaine est tellement inexplicable que la
facilité est, dans la plupart des cas, une échappatoire à cette complexité
ingérable.
Pour concilier ces destins multiples qui sont l’essence de
notre personne, il est souvent impératif de prendre en otage une partie de soi,
de la cacher et la mettre entre parenthèses le temps de vivre une autre vie.
Ces digressions semblent souvent s’imposer à nous, comme si tout à coup un mur
s’érigeait en travers de notre route, et qu’un seul portail ne nous permettait
l’accès à la suite. Or, ces murailles sont parsemées de portes, trappes et autres meurtrières à travers
lesquelles nous pouvons nous faufiler, nous hisser. Les existences à mettre
entre parenthèses sont entre nos mains, et le choix est nôtre. Une fois de
plus, la facilité s’immisce souvent dans cette conversation avec nous-mêmes.
Subir l’influence de son entourage, de nos rêves passés est bien plus simple
que de tourner le dos à nos choix passés pour en faire un nouveau.
Parfois, nous regrettons une partie mise entre parenthèses.
Nous nous haïssons d’avoir opté pour une vie et pas l’autre, et un mur se
dresse à nouveau devant nous, sans issue. C’est la mort. Mais la mort n’est
pas, et ces vies laissées en chemin ne sont qu’entre parenthèses. Il ne tient
qu’à nous de les rouvrir.
Je plie bagages, adieu chapitre allemand. Je m’encours rouvrir
les parenthèses de mon cœur.
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