dimanche 22 septembre 2013
A flots.
Des gouttes perlent sur mes joues couleur sanguine
Sont-ce des larmes, sont-ce des perles acides?
Sont elles gorgées de sable du Sahara ou d'une douleur assassine?
Une coupe pleine déborde sur mon esprit vide
Leur fraîcheur divague et fait fausse route
De mon menton barbu, elles tombent dans le vide
Où s'écoulent donc la peine et poids du doute?
Le long de la rigole, sillonnent ces fluides
Mais la tristesse de ce soir d'automne
Profite du terrain libre dans mon corps fragile
Pour s'installer, terrible et monotone
Et à mon cœur, se fixer, immobile
Un sentiment de détresse, insatiable
M'envahit de pore en pore, de tête en cœur
Ne reste de moi, vestige d'homme minable
Qu'un chardon mort de rancoeur
jeudi 19 septembre 2013
Le saule pleureur.
Il allait sans but, tel un nuage baladé par les vents d’est
en ouest sans se soucier d’un quelconque itinéraire. L’âme tranquille et le pas
léger, il se promenait donc à travers la foule de vies qui l’entouraient.
Temple de quiétude dans l’effervescence urbaine, il se laissa emporter par un
chemin sinuant entre la ville et ses abords davantage tranquilles. Chaque pas,
chaque horizon nouveau le rapprochait un peu plus d’un lieu dont il ignorait
encore l’existence, un lieu magique, correspondant comme aucun endroit au monde
à l’état d’esprit qu’il reflétait. Peu à peu, les hautes tours dénuées de toute
harmonie laissaient place à des champs de roseau et autres chênes dont l’âge
impose le respect dans cette société où tout semble éphémère.
Le calme transparaissant de son allure désinvolte n’était
pourtant qu’illusion. Sous ses mèches balayées au vent et ses yeux transperçant
le paysage, ce garçon bouillonnait de sentiments destructeurs et invincibles.
Les dernières nouvelles n’avaient pas été très bonnes, et son esprit commençait
à se sentir épuisé d’avoir tant lutté contre ces fatalités. Ses petits poings
endoloris et ses hématomes sur le cœur lui rappelaient à chaque instant autant de
combats menés, que de défaites attristantes. Son petit corps, basé mais mou, affaibli, mais
encore vaillant, se devait de prendre le relais face à un épuisement à peine
maquillé en quiétude.
Ainsi, il allait, et vint un moment où il n’alla plus. Une vision
l’interpella. Ce fut d’ailleurs la première chose qu’il remarqua depuis le
début de sa ballade, entamée quelques heures auparavant. Sous ses yeux s’offrit
un paysage qui lui tint le souffle en haleine l’espace d’un instant. Un lac,
siégeant majestueusement au creux d’une vallée de verdure. La pelouse, d’un
vert printanier, s’étendait à perte de vue, tandis que le bleu du lac se liait
à la grisaille des nuages qu’il reflétait. Un seul arbre apparaissait à
quelques centaines de mètres, un saule-pleureur. Il contempla ce somptueux
panorama, immobile, durant quelques minutes, puis, soudain entendit une
puissante détonation. Les foudres qui avaient quitté son esprit à la vue de ce
havre de paix signaient, non sans violence, leur retour. Un retour céleste
cette fois. Et quelques secondes plus tard, de lourdes gouttes d’eau
commencèrent à se jeter au sol, accompagnées du son et de l’odeur qui leur est
caractéristique, lorsqu’un orage perturbe un été trop sec et chaud. Il laissa
la pluie le recouvrir de cette sensation délicieuse, mais décida de s’abriter
sous cet arbre en mécanique causée par le souffle de la nature.
Alors qu’il s’approchait du saule, celui-ci lui semblait
tout à coup animé d’une vie incroyable. Les longues branches pendantes lui
inspiraient la chevelure d’un homme agitée par un puissant mouvement. C’est
alors que lui vint en tête cette question : « Pourquoi cette pure
splendeur a-t-elle été dénommée « saule pleureur » ? Comme les
tiges verdoyantes lui chatouillaient le cou, il décida de poser la question à
l’arbre. « Saule pleureur, pourquoi es-tu si triste ? Ta
chevelure de nature et ton écorce vive et rugueuse ne devraient-elles pas
refléter de toi un végétal vigoureux ? Ton tronc, plus long que mon bras
et tes innombrables branches ne font-ils pas de toi le roi de ce royaume de
verdure ? » Le saule émit une réponse à laquelle le jeune homme ne s’attendait
pas. Dans un sursaut d’effroi, il crut entendre, bien qu’il ne soit toujours
pas certain que ces paroles ne soient pas issues de son imagination, ce
discours : « Jeune homme, vous me semblez bien indiscret avec vos
questions à répétition, et votre discours me fait briller d’une éloquence dont
je n’ai nullement besoin. Je ne suis point triste. Je ne suis point joyeux. Je
ne suis point fâché, ni nostalgique. Si l’on m’a ainsi dénommé, c’est parce que
les gouttes de pluie coulent de mes feuilles verticales, telles des larmes
parcourant un visage, avant de partir je ne sais ou, en coulant du menton. Je
ne suis aucune de ces émotions, je les suis toutes. Je peux prendre votre
désespoir, et le filtrer dans mes racines, comme je peux, si vous le voulez
bien, partager votre fierté et vos sourires pour que mes bras les plus élevés
puissent se couvrir de bourgeons. »
Lorsque la pluie cessa de tomber des cieux, il quitta l’étreinte
de l’arbre pour observer ce paysage désormais déchiré par les éclairs s’éloignant
peu à peu, et ce soleil resplendissant, offrant à la vallée un air nouveau. Il
était maintenant serein et prêt à reprendre le chemin de la ville. Sa colère s’était
comme évaporée, ses doutes, mais quels doutes ? Il ne se sentait plus
tourmenté. Il alla alors, sans se retourner, de peur de rester prisonnier de la
vallée. Il se promit à lui-même qu’à chaque peine de cœur, chaque échec
cuisant, ou chaque moment extatique, il rendrait visite à son vieil ami, et c’est
précisément ce qu’il fit.
Nous avons tous un saule pleureur autour de nous, même si
parfois, nous restons aveugles à ses vertus. Et une clairière, et un orage, et
un soleil, ouvrons les yeux, ils sont juste là.
mercredi 4 septembre 2013
Si tu mets les voiles.
Si tu mets les voiles, en ce jour d’été, tu embarqueras dans
ton sillage le soleil planant, les oiseaux s’élançant dans ce ciel estival,
lorsque que notre amour était neuf, et nos cœurs élevés. Le jour était jeune,
la nuit, longue et la lune immobile au son des oiseaux couche-tard.
Mais si tu restes, je t’offrirai un jour comme aucun ne fut jamais,
ni ne sera à nouveau. Nous enfourcherons le soleil, dresserons la pluie,
converserons avec les arbres et vénérerons les vents.
Et si tu pars, je comprendrai. Mais laisse-moi un soupçon d’amour
pour le porter à mes lèvres sèches.
Si tu mets les voiles, et je sais que tu le feras, je t’implore
d’ordonner au monde de cesser de tourner jusqu’à ce que tu te retournes vers moi,
si un jour tu le fais. A quoi bon aimer si je ne peux t’enlacer? Permets moi de
te dire, avant que tu lèves l’ancre, que j’agoniserai lentement jusqu’à ton
prochain signe de la main.
Mais si tu restes, je t’offrirai une nuit comme aucune ne
fut jamais, ni ne sera à nouveau. Je naviguerai sur tes lèvres, parcourrai ta
peau, parlerai à tes yeux qui me sont si chers.
Et si tu pars, je ne pleurerai pas. Mais laisse-moi une part
de ton cœur à contempler, attristé.
Si tu mets les voiles, et je sais que tu dois le faire. Il
ne me restera plus rien au monde à idolâtrer. Seul dans une salle vidée,
remplie de ce vide, comme ce regard vague sur ton visage blême. J’aurais été l’ombre
de ta propre pénombre si cela m’avait permis de rester à tes côtés.
Si tu mets les voiles…
Libellés :
Adieu,
déceptions,
Jacques Brel,
Navire,
Traduction
Inscription à :
Articles (Atom)