Les yeux clos, la douleur, si aiguë et certes comparable à un bien lourd fardeau semblait lui être délestée. Voilà quelques livres de moins à soulever de ses mains gercées d'un effort surhumain.
Les yeux clos et libérée du carcan céleste, ses jambes soudainement animées d'une liberté perdue depuis des années étaient alors prêtes à l'emmener dans de quelconques directions.
Les yeux clos, le poids du passé semblait s'évaporer dans une gamme subtilement pianotée de ses mains doctes à l'harmonie vitale. Exempte de regrets, de déceptions et autres chimères des jours vécus, elle jouissait de cette légèreté enfin acquise.
Les yeux clos, les romances, nuits d'ivresse amoureuse, d'orages sensuels et les regards enivrés d'une passion légendaire lui réchauffaient le cœur. Le sourire paisible esquissé par ses lèvres bleutées témoignaient de la quiétude de ces soleils de minuit qui autrefois scintillaient sur son sommeil en de somptueux rayons de bonheur.
Les yeux clos, les doutes concernant le lendemain n'étaient guère plus que des poussières de broutilles se laissant choir sur le sol humide. Qu'importait l'avenir d'un monde hostile à une humanité se révélant incapable de briser les chaînes de la morosité morbide?
Les yeux clos, amis et famille de sang comme de cœur en pleurs autour de son petit corps inerte, microbe dans un univers d'une immensité incommensurable, la paix s'emparait de ses pensées si souvent embrumées.
Les yeux clos, elle contemplait plus que jamais son parcours. Ne rien regretter, ne rien saboter, voilà les clés d'un sommeil éclairé les yeux fermés.
jeudi 27 mars 2014
dimanche 23 mars 2014
Va-t'en.
Va-t'en. Prends donc ton envol vers de nouveaux horizons.
Et dans ta trajectoire, réfléchis à ta gloire.
Et dans ta traversée, repense au verre brisé.
Va-t'en. Emporte tout ce pourquoi je t'ai aimé et ne reviens
pas.
Et dans ton sillage, nos scènes de ménage.
Et dans ton remous, tous tes sales coups.
Va-t'en, je te dis. Disparais de ma vue, de ma vie.
Et dans ton ombre, ce que tu as de plus immonde.
Et dans tes pas, que résonne un fracas.
Va-t'en donc, je ne te retiens pas.
Et dans ses bras, oublie mon embarras.
Et dans votre demeure, combien je me meurs.
Va-t'en, je t'en somme. Ne te retourne pas.
D'un pas assuré, laisse-moi tout ranger.
Hors de ma vue, laisse-moi t'oublier.
Va-t'en, cours-t'en heureux.
Et dans mes sourires, je cesserai de te maudire.
Et quand ma vie sera saine, j'oublierai ma haine.
Et ma confiance réinstaurée, je ne songerai guère plus à ta
vie dorée.
Et ma vie remplie, je volerai loin de notre nid.
Va-t'en. Oublie-moi.
Va-t'en.
mardi 4 mars 2014
Des héros.
Ils sont des héros, ils l’ont dans la peau. C’est comme dans
le sang, du cerveau aux os. De leurs ailes légères bien que de plomb, ils
planent par-dessus la pitoyable plèbe qu’ils surplombent. Ou bien de leur zèle ?
Leur or n’a ni carats ni diamants incrustés, mais n’est pas pour autant dénué
de prix. Et quel prix ! Après avoir payé de sa dignité, son estime de soi
et de sa réalité piquée à vif, que reste-t-il donc ? Des projets, des rêves ?
À quoi bon s’il suffit de s’envoyer en l’air pour les frôler du bout des doigts
dans un mouvement las et mal contrôlé ?
Ils sont des héros, anciens prolos. Ils ont touché le gros
lot. Se brossant des soucis, s’en shootant de la vie, ils sont libres, si
libres. Et pourtant assujettis au semblant de désir pervers qu’il leur reste.
Ils s’évertuent à revendiquer leur légèreté, mais même celle-ci pris du plomb
dans l’aile. Les bras couverts de bleus, leur tête embrumée toute la journée, ils
tentent de se réchauffer le cœur de petits réconforts chimiques, comme
magiques, mais arrive un moment où, meurtrie, leur semblant de vie s’évapore, à
l’image des substances qu’ils ingurgitent.
Ils sont des héros, de Christiane à Amy, de Kurt à Philip,
tous de beaux héros tombés à l’eau, trop faibles pour nager vers la rive
droite. Les poussières de leurs ailes pitoyables se sont envolées, et la poudre
dans les yeux ne fait plus. Certains reposent dans un semblant de paix, d’autres
s’accrochent encore aujourd’hui davantage à leurs cachets qu’à la vie qui leur
a été donnée de vivre.
dimanche 2 mars 2014
Rédemption.
J’ai toujours considéré que demander pardon était l’une des
tâches les plus difficiles à accomplir au monde. Du moins, en ce qui concerne
les vrais « pardon ». Si vous saviez le nombre de « désolé »
non pensés que j’ai pu prononcer au cours de mon existence… Après avoir fauté,
se présenter face à la personne blessée, trompée, arnaquée peut se révéler plus
que délicat. Cette crainte d’une colère trop puissante pour essuyer le péché de
discorde, ou encore l’appréhension à l’idée que notre culpabilité ne soit pas
prise au sérieux me paralysent de tout mon être. Mais outre ce supplice qu’est
à mes yeux l’absolution, apparaît une corvée d’une difficulté bien plus
prononcée encore : l’accord du pardon.
Certains pardons sont bien plus simples à octroyer que d’autres.
Lorsqu’il ne s’agit que d’une bousculade, un malentendu, ou encore une parole
certes blessante, mais prononcée dans un moment d’absence ou de bêtise, lorsqu’il
ne s’agit que de broutilles de ces sortes, pardonner ou opter pour le chemin de
la colère ne relève pas d’un dilemme cornélien.
En revanche, en cas de douleur profonde, de cicatrices trop
récentes ou trop purulentes, l’épreuve du pardon exerce en nous une action ma
foi très curieuse. L’esprit le plus droit et tenant le cap se retrouve pris d’une
espèce de pulsion lunatique incontrôlable qui le ronge de part en part. Un
temps apaisées, le suivant, piquées à vif, les cordes sensibles se retrouvent
étirées entre la compréhension que l’on peut avoir de la situation, et bien au
contraire, cette rage que l’on éprouve en réexaminant les images et instants
blessants.
L’envie d’accorder le pardon et la nostalgie du bon vieux
temps qu’elle suscite sont parfois très fortes, mais, comme un train attendant
le personnel d’aiguillage à l’approche d’un embranchement, cette colère
piquante au plus profond de nous ravive des sensations douloureuses telles que
des gifles furtives, des chutes au ralenti ou des pincements au cœur qu’aucun
pacemaker ne semble pouvoir apaiser.
C’est alors que le choix s’impose. Ces situations
inextricables nous mènent souvent à l’octroi d’un pardon restant blessé tout au
fond ou à un rejet torturé de doutes. La vie n’est-elle pas composée d’une
chaine infinie de doutes au final ? Dans de nombreux cas, il arrive de se
demander si la solution sélectionnée était vraiment la bonne. Le plus important
dans de tels cas est de suivre s conscience et de se rapprocher le plus
possible de la situation dans laquelle nous nous retrouverons le moins lésés.
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