Il m’est difficile d’écrire au sujet de ma mère. Peut être est-ce encore trop frais dans mon cœur et mon esprit. Peut être ne suis-je pas encore prêt à entamer une nouvelle page de mon histoire. Ce n’est pourtant pas un choix que de continuer à marquer les jours, les mois, de ma présence ici-bas. C’est la vie. C’est ainsi. Je suis forcé de m’attaquer aux pages à écrire –je n’en ai pas la force -.
L’écriture n’est jamais un exercice simple. C’est un moment de retrouvailles avec soi-même, c’est une conversation avec son égo. Vous dites « voilà ce que je pense », il réplique « non, c’est d’un mauvais… ». C’est un cercle sans fin – un Samsara-, dès que vous posez la plume sur le papier, vous la plantez dans votre esprit. L’écriture, c’est une torture. Mais comme toute torture, elle assure le soulagement dans sa postérité. Pourquoi avoue-t-on après avoir été malmené ? Où est le plaisir à fournir un effort physique ? Pourquoi écrit-on ?
L’écrivain est sado-maso.
Dans ma douleur, -je ne vais pas le cacher, il y en a énormément-, j’ai été bloqué par ma conscience. Elle m’a formellement interdit de me confesser, de dévoiler mes plaies. Mes larmes bouillaient sous mes yeux, mais ne sont jamais sorties. Ce fut un supplice que de laisser cette vile âme ronger mon cœur défectueux. Mais ça fait partie du jeu. Il faut jouer jusqu’au bout.
J’eus jadis une réputation de mauvais perdant. Cette époque est révolue, et je veux le prouver. Au monde, à moi-même. J’ai joué jusqu’à ce que la partie ne soit arrêtée (par le bon sens). A présent je change de camp. Ce n’est plus la douleur qui grave mon cœur de symboles de faiblesse. C’est moi qui sors la souffrance sur papier, qui la réduis en quelques mots à un minable jeu de rôle où je nous nous sommes échangés, mon âme et moi.
Nous souffrons tous mais écrivons et soyons conscients que la peine sera présente, que l’on pose la plume sur une feuille, ou qu’on la range au bureau.
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