lundi 12 août 2013

Un Munich de perdu.

Un Munich de perdu…
Dix de retrouvés, vous me direz. Et c’est ce que j’ai moi-même cru avant de regagner cette ville qui un jour sembla si magique et belle à mes yeux. Malheureusement, tous les dictons ne sont pas bons à prendre ni à suivre. En prenant la décision pourtant très simple d’ouvrir une nouvelle parenthèse munichoise, je me suis retrouvé face à un miroir dévoilant une vérité bien cruelle.
Munich représente la liberté. Nous avons tous une ville de la liberté. Pour certains, il s’agit de Londres, Paris, San Diego ou Milan. La mienne, c’est Munich. Lorsque je m’y suis rendu à l’occasion de mon année sabbatique, j’ai, et ce pour la première fois dans ma vie, quitté la famille, les amis, les repères. Pourquoi s’infliger un tel défi ? Peut-être par besoin de sonder ma propre vie. Et ce fut une de ces révélations qui changent un homme. La ville est témoin de mes premières folies, excès et bêtises. Et quels moments. Entre cet aspect culturel, qui m’avait été inculqué, mais dont les études secondaires m’avaient détourné, mes sorties inoubliables dont il ne me reste que des bribes pour certaines, et ces diverses expériences personnelles, jamais je ne me suis senti autant changé, en si peu de temps. Tout à coup, je réalisais que je pouvais devenir ce que je voulais. Si je voulais devenir bilingue, j’en avais l’occasion, un grand sorteur, idem, une personne engagée, même topo. Munich 2009 fut pour moi un voyage initiatique, un mode d’emploi de ma vie. Certes, je n’ai pas été capable de déchiffrer tous les chapitres de ce manuel, n’étant pas un parfait germanophone, mais les fondements de mes valeurs les plus chères et de mes aspirations les plus ultimes sont nés dans cette ville.
Or, cette cité de beauté s’est, cette année, révélée n’être qu’une mascarade. Le Munich que j’ai vécu, traversé, piétiné, n’est plus celui qu’il était auparavant. J’ai trouvé la ville sombre, et laide. J’y ai vu une architecture très pauvre, dans sa globalité, quelques bâtiments mis à part. L’ambiance de liberté, et de légèreté que j’étais certain de retrouver, s’est comme évaporée pour laisser place à de la morosité et cette espèce de facilité à se conformer au reste des métropoles. Tout était lourd, ou bien étais-je sourd ? Non, des amis ayant vécu la même expérience que moi n’ont pas non plus revu le Munich de leurs souvenirs. La population y était très froide, même détestable. La nourriture était infâme, la gare de Münchner Freiheit ne respirait plus la liberté, mais le fric et la mocheté. Même l’accent, qui me semblait si charmant, des bavarois, en arrivait à me dégoûter. Chaque soir, je rêvais de ce paradis désormais englouti par la lave d’un volcan d’ennui. Je suis triste et déçu.
Je reviendrai à Munich, en tentant de ne pas comparer, ne pas préférer ou regretter, en étant un étranger. Et là, je vous dirai ce que j’en aurai pensé. Mais aujourd’hui, cette ville n’est plus qu’une partie de mon cœur, faite d’amour, et d’amer. 

lundi 5 août 2013

Une cage ouverte.

La boucle est donc bouclée.

Me voilà pour ainsi dire sorti de ce que certains appellent "le placard", un terme qui ne me correspond cependant pas. Lorsque l'on est séquestré dans un placard, on se retrouve dans l'obscurité fatale, dans des ténèbres dénuées de tout espoir. Certains évoqueront certes les rais de lumière provoqués par ces interstices permettant au meuble de ne pas empester le renfermé, mais cette tendance à broyer du noir, je ne l'ai jamais ressentie, du moins en ce qui concerne mon orientation sexuelle.

Non, le fait de mentir, et de peindre une toile de secrets, de non-dits et de silence en brouhaha m'évoque plutôt l'image d'une cage dont les barreaux de peur et de honte étaient suffisamment espacés pour me permettre de contempler, et même d'effleurer du bout des doigts les merveilles du monde m'entourant et me narguant. Je disposais néanmoins de la clef du cadenas assurant ma captivité, mais, dans un premier temps, je n'avais pas conscience de cette possession miraculeuse. Par la suite, cette fresque de liberté a exercé sur ma personne une espèce d'intimidation fantasmagorique. Je craignais le jugement, le rejet. Toutefois, et tel un papillon de nuit attiré par la lueur du néon, je ressentais cette velléité de scier ces barreaux d'acier me séparant du moi dont je rêvais. Aujourd'hui sorti de ma volière, je réalise à quel point j'avais tort de me méfier de mon entourage et d'avoir imaginé ne serait-ce qu'une seconde un dénouement tragique.

Je me sens désormais libre, mais cette sensation d'avoir perdu des années de vie, à mentir et à cacher qui je suis persiste et laisse un goût amer en bouche.


jeudi 1 août 2013

Les échecs.

Échouer fièrement ou pitoyablement, cela reste un échec. Cela reste pathétique et une certaine mort en soi.

C'est comme quand tu te sens comme une merde gisant au sol sous un jour de pluie. Et que tu es piétiné par un passant, maudit par tous ces gens. C'est Exactement ce que je ressens.

Les échecs sont un processus de dégradation (volontaire, parfois) de la vie. C'est un oui au non. C'est un "non, c'est non". C'est un "casse-toi" pauvre con.

Vivre un échec, c'est être? Nous ne sommes qu'échecs. Les uns brillent pathétiquement de leurs incapacités tandis que d'autres marinent dans la nuit, dans la mouise, attendant un nouveau tournant, espérant, riant, mais pleurant intérieurement...

Ah... les illusions... Il n'y a que ça de bon. Je l'attends toujours mon tournant à la con. Je pleure pour qu'il tourne, cet enfoiré. Ma vie est foirée. C'est une fête qui déraille, un rouleau qui s'étale, un arrêt cardiaque en ambulance.
Tellement. Le monde s'en balance de tes souffrances, de tes errances, de ta vie rance.
Un vinyl rayé, des pompes bousillées, un slip déchiré.

C'est alors un grand cru de vitriol qui s'annonce, un saut de l'ange du balcon ou une dégustation d'aspirines. Et C'est là l'aspect encore plus pervers de l'échec. C'est que l'échec entraîne l'échec.



L'oubli.

Ma crainte la plus aiguë, dans la vie que je mène tant bien que mal, est la peur de l’oubli. Tomber dans l’indifférence, dans l’absence de souvenirs bons, beaux comme mauvais et tristes semble à mes yeux être la pire punition que le destin puisse m’octroyer.

Pour cette raison, je me déchaîne à rompre les chaines qui me retiennent dans le noir, dans l’infâme quotidien de l’abandon. Mais cette lutte intense et ardue n’est pas toujours couronnée de succès. Si l’on peut dire, bien que cette idée soit fort peu souvent envisageable lorsque l’on se baigne dans un marais de soucis, que l’on oubliera les gens qui nous blessent, les moments de stress, mais pas les nuits d’ivresse – et par « ivresse », je ne fais pas référence à ces moments éthyliques qui nous permettent parfois de garder l’équilibre sur ce chemin de pilotis, mais à ces moments d’amour ardent - cette peur viscérale ne me quitte jamais complètement. Lorsqu’une relation touche à sa fin, elle revient en force, alors que durant les instants de bonheur intense, elle n’était que latente.

Pourtant, et étrangement,  à l’inverse de peurs telles que l’arachnophobie ou l’agoraphobie, je ne fuis pas devant cette inquiétude. Je ne la hais point. Et je ne voudrais pas oublier mon anxiété face à l’oubli. La crainte d’être délaissé et oublié peut être un moteur dans la vie, me propulsant  à travers les étapes de l’existence, en vue de laisser sur cette terre une pierre portant mon nom, des sourires m’étant destinés, des larmes à mon égard.

Car après tout, l’oubli, c’est la fin, c’est la mort. Comme un vieillard perd la tête et oublie sa liste de commissions ou le nom de ses petits-enfants. Je ne veux pas oublier que l’on pourrait m’oublier. Et je n’oublierai rien, du moins pas avant d’être emporté doucement vers l’au-delà.


Au final, si l’on m’oublie, le tort se portera sur la mémoire défaillante de la personne, ou sur son aveuglement. Mais moi, je ne vous oublierai pas.