mercredi 16 mai 2012

Le Crabe.


      Ce soir, je suis pensif. C’est étrange, cela fait quelques temps que je ne parviens pas à trouver le sommeil, mon esprit étant tiraillé entre des questions de société et des problèmes personnels. Je viens de regarder un épisode de Strip-Tease - vous voyez, le magazine qui déshabille la société- où l’on suit les derniers instant d’une personne atteinte du cancer. Je suis ensuite sorti dans le jardin, pour fumer une cigarette fourrée de remords et autres saletés chimiques, tout en contemplant ce ciel dénué de tout nuage. J’aime les constellations, je l’ai déjà écrit, et je le réécrirai surement, mais ces constructions d’astres me font ressentir le vaste de cet univers. Dès que je lève les yeux vers le ciel, je prends conscience de la petitesse de la place que j’occupe dans ce monde. Enfin soit, je m’égare, comme toujours.

      Cet épisode portant sur la mort de cette femme m’a inévitablement évoqué le parcours de ma mère.  Cela fait plus de deux ans maintenant, et je ressens encore le besoin d’en parler. Peut-être ai-je trop tût mes pensées, et retenu mes larmes. Parallèlement, cela fait deux ans que je tiens ce blog, malgré de longues périodes vides. Il me tient à cœur, et je dois le dire, m’a un peu aidé à surmonter l’épreuve à laquelle j’ai été soumis. C’est probablement pour cela que je vous reviens. Je vous reviens toujours en temps de crise personnelle, comme un chat vient au maître lorsqu’il est affamé.

      Le cancer, je n’y avais jamais réfléchi avant d’être touché de près par la maladie. Lorsqu’on a diagnostiqué un cancer à ma mère, j’ai d’ailleurs pris la nouvelle avec une légèreté invraisemblable, probablement ancrée d’un optimisme que rien n’aurait pu entacher. J’étais persuadé qu’elle surmonterait cette étape, qui,  pour moi, n’était qu’une maladie parmi tant d’autres. D’ailleurs dans ma tête, le cancer se guérissait facilement s’il était diagnostiqué rapidement.

      Si j’avais été conscient de la gravité de la nouvelle, beaucoup de choses se seraient déroulées différemment. Peut-être aurais-je pu mieux aider ma mère à traverser la tempête, peut-être aurais-je moins sous-estimé sa douleur, peut-être, enfin, aurais-je été davantage présent lorsqu’elle avait besoin de moi. Paradoxalement, elle n’aurait probablement pas voulu ces comportements. Elle aurait détesté me voir mettre ma vie entre parenthèses pour elle, et les projets que j’ai accomplis malgré sa maladie l’ont, au final, beaucoup aidée à garder le sourire quand rien ne pouvait lui permettre de le faire.

      Car elle a été courageuse. Elle se plaignait très rarement des douleurs, et le peu de fois où elle s’en plaignait, je pensais qu’elle exagérait. J’avais tort. La suite des évènements m’a prouvé à quel point j’étais dans le flou.

      Pourtant, la première année de cancer s’était clôturée sur une bonne note : elle était guérie, tout allait mieux. J’avais donc eu raison de ne pas prendre ce cancer trop au sérieux. C’est ce que je pensais, et un peu moins d’un an plus tard, lorsque l’on a appris que la tumeur était de retour, j’étais nettement moins positif. Cette fois, c’était général. C’était mort. Et je devais partir vivre aux Etats-Unis deux semaines plus tard. Inutile de vous dire que je n’en avais plus envie. Mais je l’ai fait, c’est ce qu’elle voulait. C’est ce qu’il fallait faire. J’ai pris la bonne décision.

      Puis elle est partie, et ce jour là, j’ai perdu une partie de moi. Je n’oublierai jamais ses derniers mots, je n’oublierai jamais les minutes qui ont suivi. Je suis heureux d’avoir pu rentrer pour lui dire au revoir. Je suis heureux d’avoir vu son sourire une dernière fois. Mais je suis triste.

      Je ne sais pas trop pourquoi je vous raconte tout ça. C’est très personnel, et je ne comprends pas cette partie de moi qui veut absolument divulguer cette intimité. Je crois que j’écris cela pour tous ceux qui sont touchés de près comme de loin par le cancer. Si vous lisez cet article, et que vous êtes concernés, sachez que, bien que le cancer ne se guérisse pas, une présence, des mots, des sourires peuvent guérir le cœur. Si vous voyez l’avenir sombrement, soyez là pour la personne. Si vous êtes optimiste, soyez là aussi.

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